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dimanche 19 juin 2011

Soudan: danger d'escalade à l'approche de la sécession du Sud

AFP Simon Martinelli

KHARTOUM — Le conflit qui fait rage à la frontière entre le Nord et le Sud du Soudan pourrait s'aggraver à quelques semaines de l'indépendance du Sud, Khartoum cherchant à affirmer son pouvoir mais pour les analystes une guerre généralisée reste peu probable.
Le gouvernement du président Omar el-Béchir a promis d'utiliser tous les moyens à sa disposition, y compris les bombardements aériens et l'artillerie lourde, pour en finir avec la "rébellion" de miliciens alliés à l'Armée populaire de libération du Soudan (SPLA), l'armée sudiste, dans l'Etat nordiste du Kordofan-Sud.
Il s'agit du second conflit majeur dans la région frontalière en moins d'un mois, après l'occupation par l'armée nordiste de la région disputée d'Abyei le 21 mai, qui a poussé plus de 110.000 personnes à fuir vers le sud, selon des estimations de l'ONU.
"La prise d'Abyei par Khartoum -et ses positionnements agressifs ailleurs- visent à démontrer sa force localement, à influencer les négociations sur le futur statut de ce territoire, et à renforcer sa position à la table des négociations", affirme le spécialiste du Soudan Zach Vertin dans un rapport récent de l'International Crisis Group.
Les violences à Abyei et dans le Kordofan-Sud voisin menacent aussi l'accord de paix de 2005 entre Khartoum et les ex-rebelles sudistes, qui a mis fin à 22 ans d'une guerre civile dévastatrice et ouvert la voie à une sécession du Sud.
Mais Khartoum semble plus préoccupé par sa propre situation.
A l'approche de la partition, ces campagnes militaires sont une manière de faire taire les critiques au sein du régime, estiment des observateurs, d'après qui le gouvernement de M. Béchir parie dans le même temps sur le fait que le Sud ne voudra pas mettre en danger son indépendance.
"Je pense que la direction du Parti du congrès national (NCP, au pouvoir) à Khartoum veut faire une démonstration de force qui pourrait lui donner plus de crédibilité et de légitimité", affirme Al-Tayeb Zein al-Abidine, professeur de sciences politiques à l'Université de Khartoum.
"Le gouvernement est très contrarié par la sécession du sud, alors il veut réagir contre le SPLM (...), qui est le plus grand parti après le NCP dans le nord", ajoute-t-il, en référence à la branche politique de la SPLA, au pouvoir dans le Sud.
Le SPLM est passé très près de la victoire le mois dernier lors de l'élection du gouverneur du Kordofan-Sud, le seul Etat pétrolier nordiste, avant de se retirer en faisant état de fraudes.
Jeudi, le porte-parole du NCP Ibrahim Ghandour a déclaré que la branche nordiste du SPLM ne serait pas autorisée à poursuivre ses activités sous sa forme actuelle, "parce qu'elle est le parti d'un autre pays".
Selon un analyste occidental souhaitant rester anonyme, c'est le refus de Khartoum d'accepter la probable victoire du candidat du SPLM au Kordofan-Sud et son insistance à désarmer les troupes alliées à la SPLA dans le nord (estimées à 40.000) qui a provoqué le dernier conflit.
Des leaders religieux et des militants accusent Khartoum, qui dément, de procéder à un nettoyage ethnique au Kordofan-sud visant les Nuba qui se sont battus du côté des sudistes pendant la guerre civile.
"Si les relations continuent à se dégrader alors bien sûr, l'indépendance du sud sera accompagnée par plus de violence, directe ou indirecte", affirme Safwat Fanous, professeur de sciences politiques à l'Université de Khartoum.
"C'est déjà en cours. Il y a des escarmouches à la frontière. La SPLA accuse le nord de bombarder le sud et d'armer les rebelles du sud", ajoute-t-il.
D'autres observateurs estiment que les conflits à Abyei et dans le Kordofan-Sud sont plus qu'une démonstration de force et pourraient déborder vers l'Etat du Nil bleu (est).
Mais les analystes ne s'attendent pas à une guerre généralisée entre Nord et Sud, du moins pas dans l'avenir proche.
"Ils ont tellement d'autres problèmes (...). Mais je pense que nous les verrons aller aux limites du possible, chaque partie poussant l'autre aussi loin que possible", selon M. Zein al-Abidine.

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